Theory of Constraints and Its Implications for Management Accounting de Noreen, Smith et MacKey
En 1983, Elyahu Goldratt a publié un article polémique "Comptabilité analytique : ennemi public numéro 1 de la productivité". A sa grande surprise, il était invité deux ans plus tard à la conférence annuelle de l'Institute of Management Accountants pour y exposer sa théorie. L'ouvrage a été rédigé ensuite, pour vérifier les propos de l'inventeur de la Théorie des Contraintes (TOC). Le livre débute par une excellente synthèse de cinq pages sur la TOC et enchaîne sur ses effets comparés par rapport au management classique par les prix de revient (Activity Based Costing ou compatbilité analytique). Ce livre, écrit par des comptables "ancienne école", exhibe la limite principale du modèle analytique : il lisse la contribution de tous dans ses divers calculs (prix de revient, rentabilité de produits ou de clients), alors que la TOC nous enseigne que la contrainte doit attirer notre attention plus que tout autre poste.
Cette limite a par exemple deux effets concrets : dans une opération de réduction des coûts, la comptabilité analytique va réduire uniformément les dépenses, en tapant potentiellement sur la contrainte, et donc induire des effets catastrophiques sur la performance, réduisant à néant les "gains" sur les prix. En opérant au contraire un focus sur les coûts par heure de la contrainte, la comptabilité TOC va préserver la contrainte et cibler les réductions budgétaires sur les non-contraintes.
Autre effet, la ventilation brutale (linéaire toujours) des frais généraux sur les petites séries tue l'innovation. En comptabilité TOC, les auteurs constatent dans leur panel de 21 entreprises une augmentation de la taille de la gamme, car les ressources non-contraintes sont considérées gratuites, libérant ainsi les possibilités d'innover.
L'ouvrage propose un retour terrain sur l'efficacité des outils TOC, en distinguant le coeur de la TOC (le drum buffer rope et la focalisation en 5 étapes sur la contrainte dans l'usine), et les Thinkings Process. Le premier s'avère efficace à 100% dans l'échantillon, tandis que les TP s'imposent plus difficilement, ils nécessitent une tournure d'esprit analytique et ouverte que la grande majorité des personnes interrogées n'ont pas.
Enfin, l'ouvrage termine sur une triste réalité : la difficulté à rendre pérenne et holistique un changement local à la production. Ceux qui ont amélioré leur efficacité sont souvent /brimés/ pour avoir déplacé la contrainte vers d'autres, qui ne souhaitent pas se libérer des leurs (vente, études, ..) - qui plus est sous la pression de "soutiers" -, et vont donc plutôt en moyenne chercher à diminuer la nouvelle capacité créée à l'usine ... en diminuant les coûts.