School of Product 2024 - Compte rendu "Care & Code : Ralentir pour mieux servir"

Lors de l’édition School of Product 2024 organisée par Octo Technology, Marine Boudeau, sous-directrice des produits et services numériques dans le secteur public (DINUM pour les initiés), a captivé son auditoire lors de sa conférence Care and Code. Elle propose une vision radicalement différente du numérique : ralentir. L’idée, c’est de ralentir pour avancer mieux, de manière durable et humaine. Un message qui fait écho auprès des designers, coachs et product managers, souvent coincés entre deadlines serrées et montagnes de tickets Jira qui s’empilent. Voici les quatre enseignements de son intervention, une véritable invitation à revoir notre rapport au temps.

Marine Boudeau sur scène

Ralentir pour des services publics utiles à tous

Marine Boudeau commence par une évidence qu’on oublie parfois dans le tourbillon des projets : le numérique doit avant tout servir. Pas question de créer des outils inutiles ou frustrants, mais de répondre aux besoins concrets des citoyens. Elle partage des exemples inspirants, comme le chèque énergie, une aide proactive qui tombe directement dans la boîte aux lettres des ménages concernés, sans qu’ils aient à remplir des formulaires Kafkaïens. Résultat : un système qui simplifie réellement la vie de millions de familles. Un autre coup de cœur : la plateforme des données de valeurs foncières, qui rend transparent le marché immobilier et aide les citoyens à mieux estimer la valeur des biens.

Ces réussites montrent qu’un numérique bien conçu simplifie la vie de tous, y compris des plus vulnérables. Mais pour y parvenir, il faut prendre le temps d’écouter les utilisateurs, de tester les parcours, et d’intégrer les contraintes d’accessibilité. Un service numérique qui laisse quelqu’un sur le bord du chemin, que ce soit à cause d’un handicap ou d’une interface mal pensée, est un échec. Marine rappelle que ralentir, c’est justement se donner la chance de faire bien du premier coup.

Ralentir pour mieux mutualiser (et éviter les doublons inutiles)

Marine enchaîne sur un autre défi majeur : arrêter de réinventer la roue à chaque projet. Dans les grandes organisations, combien de fois des équipes se retrouvent à développer le même outil dans leur coin, juste parce qu’il n’existe pas de cadre commun ? Le résultat : une dette de design, une dette fonctionnelle et une dette technique monumentales et des équipes qui s’épuisent. Pas top.

Sa solution ? La mutualisation. En clair, poser des bases solides avec des standards partagés, qui permettent aux équipes de collaborer sans brider leur créativité. Marine illustre cette idée avec un exemple réjouissant : un outil RH développé par son équipe, utilisé non seulement par d’autres ministères, mais aussi par… Météo France. « C’est ça, la mutualisation : produire des solutions qui servent au-delà de leur contexte initial, et qui créent de la fierté collective. » Cette approche permet aussi de simplifier les systèmes, en réduisant la dispersion des efforts. Au final, mutualiser, c’est ralentir pour réfléchir ensemble et aller plus loin, tout en renforçant la robustesse et la durabilité des produits.

Ralentir pour incarner un management du care

Enfin, Marine aborde le sujet clé : prendre soin des équipes. Cela passe par des gestes simples mais essentiels : alléger les agendas, oser dire non, et sanctuariser du temps pour le travail de fond. Elle donne un exemple simple mais puissant : à la DINUM, les vendredis après-midi sont sanctuarisés pour du travail sans réunion. Résultat ? Les équipes gagnent du temps pour réfléchir, approfondir leurs sujets, ou simplement respirer. Parce que, comme le dit Marine, « si on ne s’accorde jamais de pauses, comment espérer créer des services qui prennent soin des autres ? »

Ralentir, c’est aussi une invitation à revoir nos priorités. « Être manager, ce n’est pas juste répartir des tâches ou tenir un planning. C’est inspirer, donner du sens et créer un cadre où les équipes se sentent bien », rappelle Marine. Cela signifie valoriser la réflexion, accepter l’échec comme une étape normale du processus, et encourager des pauses nécessaires pour innover durablement.

Vers un numérique durable et humain

Avec cette conférence, Marine Boudeau pose une question essentielle : pourquoi toujours courir ? Ralentir, c’est se donner le temps de penser mieux, de travailler mieux, et de créer un numérique qui a du sens. Pas un énième outil inutilisable ou un projet qui sera abandonné dans six mois, mais des solutions durables et respectueuses, pour les citoyens comme pour les équipes.

Et vous, dans vos projets, que pourriez-vous faire pour ralentir un peu et faire mieux ?