La Grosse Conf' 2025 - Transformer la gestion du savoir personnel et d’équipe à l’ère des LLMs

Avec l'explosion de l'intelligence artificielle et des modèles de langage (LLMs), notre manière de gérer la connaissance, qu'elle soit personnelle ou collective, est en pleine transformation. Lors d'une récente présentation, Matthieu Lagacherie a exploré les enjeux et les solutions possibles pour mieux capter, organiser et exploiter l'information à l'ère de l'IA générative.

Image de Matthieu Lagacherie durant la Grosse Conf. 2025

Pourquoi est-ce important de gérer son savoir ?

Nous avons tous déjà vécu cette frustration : oublier une idée brillante, une citation percutante ou une information clé. Dans un contexte de surcharge informationnelle, capter et réutiliser efficacement le savoir devient un véritable défi. La question centrale est donc : comment mieux gérer et exploiter nos connaissances pour ne pas les perdre et les rendre actionnables ?

Comprendre la gestion de la connaissance personnelle

La gestion de la connaissance personnelle (PKM - Personal Knowledge Management) est un concept qui englobe de nombreuses méthodologies visant à structurer et à exploiter l’information personnelle. Chaque individu peut établir son propre système en fonction de ses besoins. Ce système doit être agile et évolutif, car il reflète la façon dont chaque personne acquiert et utilise ses connaissances.

Les origines : Zettelkasten

Le Zettelkasten (littéralement “boîte à notes” en allemand) est à la fois un concept et une méthode de prise de notes visant à construire une base de connaissances durable.

Popularisée par le sociologue allemand Niklas Luhmann qui l’a perfectionnée au point d’en faire un véritable art de vivre, cette méthode repose sur la création de notes interconnectées, permettant une exploitation systématique et progressive dans le temps. Le but : éviter que les notes ne sombrent dans l’oubli.

Construire un système de prise de notes efficace

Une prise de notes efficace repose sur trois principes fondamentaux :

  • Faire de la prise de notes structurée : noter une idée principale par note. Il ne s’agit pas de tout retranscrire, mais de capturer ce qui aide à comprendre le contexte.
  • Utilisation de métadonnées : un titre, des tags qui permettent de relier les notes entre elles.
  • Itérer, et lier les notes : faire vivre ce capital de notes, les relire régulièrement et créer des liens avec les idées passées.

> “Les meilleures idées ne naissent pas d’un eurêka isolé, mais des connexions entre des pensées dispersées au fil des années.”

Mettre en place un système durable

1. Écosystème d’outils numériques

Aujourd’hui, nous disposons d’une multitude d’outils (Notion, Obsidian, Logseq...) de prise de notes, mais attention au piège de la dépendance aux outils. Les outils évoluent, disparaissent parfois. L’essentiel, c’est le format dans lequel les notes sont stockées.

Un bon format doit être :

  • Simple
  • Pérenne
  • Interopérable

Le Markdown s’impose comme standard dans l’univers du PKM. Ce format texte, versionnable, permet une mise en forme minimale, est compatible avec de nombreux outils, et surtout évite le vendor lock-in.

2. Intégrer l’IA générative dans le workflow

Matthieu partage sa knowledge stack :

Knowledge Stack présenté par Matthieu

IA intégrée via Continue.dev, outil qui permet d’interagir avec son PKM à l’aide d’un ou plusieurs LLMs, directement dans VSCode.

Matthieu distingue deux approches selon le besoin :

  • Focus Privacy : usage de modèles locaux avec Ollama (qui permet de faire tourner des petit LLMs locaux), pour ne pas exposer ses données.
  • Cas complexes : recours à Gemini pour des usages nécessitant un modèle plus puissant.

L’intérêt de Continue.dev réside dans sa capacité à switcher entre modèles locaux et cloud selon les cas d’usage.undefined

Cas d’usage : mission de ModelOps

Contexte

Architecture de Matthieu lors de son expérimentation

Dans une mission, les sources d’information sont multiples. L’objectif est de transformer tous ces fragments en notes exploitables.

Organisation des fichier

  • Inbox : notes brutes fraîchement capturées
  • Radar : glossaire/index des nouvelles technologies permettant de faire des liens avec des sources externe (internet) et interne (d’autres notes)
  • Knowledge : fichier markdown plus détaillé par domaine
  • Skills : prompts pour les outils de GenAI
  • Tools : scripts utilitaires (ex. nettoyage de notes)

C’est un exemple d’organisation, on peut aussi adopter d'autres méthodes comme PARA (Projects, Areas, Resources, Archives), popularisée dans Building a Second Brain.

L'IA générative comme catalyseur de gestion du savoir

Capturer l’information

Grâce à l’IA générative, cette phase peut être grandement automatisée et simplifiée. Elle permet de transformer des éléments bruts en contenus numériques directement exploitables.

  • Post-its : prise de photo des Post-its d’un atelier que l’on va transformer en note Markdown via un prompt.
  • Capturer un graphe d’architecture : Le LLM peut lire un graphe et l’intégrer dans les notes dans un format Markdown

Exploiter la connaissance

Une fois les informations enregistrées, l’IA permet de les exploiter facilement en interrogeant directement un LLM.

Cela permet d’obtenir des réponses claires, contextualisées, et basées sur ses propres notes.

  • Requêtes RAG : Possibilité de faire une requête avec un ciblage de fichiers spécifiques
  • Rôle : De la même manière que pour le RAG il est aussi possible de questionner le système selon un rôle défini

Raffiner l’information

Enfin, l’IA joue un rôle clé dans le raffinement de l’information, en transformant du contenu brut ou désorganisé en notes claires, synthétiques et structurées.

  • Mémos vocaux : Utilisation de Whisper en local pour la transcription, puis reformatage sous forme d’une note via un prompt
  • Résumé de documents complexes : Utilisation de la méthode Chain of Density pour générer des résumés itératifs en vérifiant les entités clés à chaque étape afin d’obtenir un très qualitatif

Experience TKM - Tribe Knowledge Management

Déployer une gestion collective du savoir

Enfin, Mathieu a expérimenté la gestion de connaissance au sein d’une équipe. Il évoque l’importance de la curation des connaissances à un niveau d’équipe. Pour que les équipes collaborent efficacement, il y a 3 principes à respecter :

  • Cibler un domaine restreint : Pour que la capitalisation soit efficace, il faut se concentrer sur un sujet précis, éviter d’être trop général.
  • Keep it simple ! : Les outils doivent être faciles à utiliser, même pour des développeurs. Des systèmes trop techniques (comme git) sont une barrière à l’adoption.
  • Utilisation des Small Language Models (SLM) : Pour des raisons de confidentialité et d’efficacité énergétique. Privilégier les prompts compatibles avec des modèles locaux. Les équipes doivent donc apprendre à adapter leurs prompts à la capacité des modèles utilisés (SLM vs LLM).

Distinguer savoir individuel et savoir collectif

Un autre point est la séparation claire entre la gestion individuelle et collective de la connaissance.

Techniquement, cette séparation est simple à mettre en place, puisqu’elle repose sur des répertoires distincts. Cela permet d’isoler les contenus personnels des contenus partagés, tout en offrant la possibilité de les combiner si besoin.

Partager un langage commun

Pour que chacun dans l’équipe puisse contribuer à la base de connaissance de manière cohérente, il faut un cadre partagé. Matthieu propose un découpage basé sur le projet InstructLab. Celui-ci repose sur une organisation en quatre grandes briques.

Toutefois, seules trois de ces briques sont réellement capitalisables par les équipes, la quatrième brique, bien qu’importante, relève des compétences intrinsèques du modèle lui-même et ne nécessite pas de capitalisation.

Voici donc un zoom sur ces trois briques activables :

  • Connaissance documentaire : Des données et des faits qui reposent sur des documents.
  • Compositional skills : Prompt ne nécessitant pas de contexte supplémentaire (pas besoin de données ou de documents supplémentaire)
  • Grounded Comp. skills : Prompt nécessitant du contexte (ex. Avec un rôle défini ou des données fournies)

Take Aways

  • Un système d’organisation doit être pensé pour durer plusieurs années. Si des choix techniques ou des outils semblent trop contraignants, ce n’est probablement pas les bons.
  • Faire de la curation et non du stockage, saisir l’information minimale nécessaire pour retrouver le contexte et les idées lors de la relecture
  • Se reposer sur un format plutôt qu’un outil

> “Le meilleur workflow, c’est celui que vous construisez. Il n’y a pas d’outil universel : testez, expérimentez, trouvez ce qui vous accélère vraiment.”