Les biais cognitifs : Comment notre cerveau agit sur nos choix ? (1/2)

Au même titre que tout individu, les métiers en charge de la conception numérique sont concernés par les biais cognitifs au quotidien. C’est ce que nous allons voir dans cet article, en faisant un petit tour d’horizon de ce que le cerveau est capable de mettre en œuvre pour nous faciliter la prise de décision ou encore influencer nos avis.

D’abord étudiés dans le domaine économique, la notion de biais cognitifs a été exploitée dans de nombreux secteurs, notamment marketing, publicitaire ou design d’expérience utilisateur.

C’est cette connaissance des biais cognitifs que l’UX designer peut utiliser pour mieux anticiper et comprendre l’expérience de l’utilisateur et ainsi l’améliorer.

1 - Les origines du biais cognitif ?

Pour comprendre ce qu’est un biais cognitif, il faut remonter à ses origines. À partir de 1972, les psychologues Daniel Kahneman et Amos Tversky ont effectué divers travaux en économie sociale cherchant à démontrer qu’une prise de décision ne s’appuie que partiellement sur la pensée rationnelle et le raisonnement leur octroyant un prix Nobel d’économie en 2002.

En 2011, Daniel Kahneman publie Système 1 / Système 2: Les deux vitesses de la pensée, un livre venant résumer ses travaux. Il distingue deux systèmes et donc deux vitesses de la pensée chez les individus :

  • Le système 1, automatique et involontaire. Il se met en place dans 95% des situations par associations d’idées, de souvenirs, d’émotions, etc. Il peut en résulter une vision cohérente mais biaisée de la réalité.
  • Le système 2 est calculateur et se structure plus lentement. Il se met en place les 5% de temps restant et demande une certaine concentration et attention de la part de l’individu. Il intervient dans la résolution de problèmes complexes.

Leur démonstration tend à prouver que, notre cerveau, pour accélérer la prise de décision, va de manière prioritaire solliciter un mode “automatique” de pensée, impliquant  nos émotions, nos expériences vécues, nos préjugés, au détriment d’un mode de pensée “rationnel”. Ainsi, la manière dont vous réagissez dans une situation donnée est conditionnée par un ou plusieurs biais cognitifs.

2 - Quelques exemples auxquels nous sommes confrontés régulièrement

Au quotidien, nous sommes tous confrontés à des biais cognitifs. Les avez-vous déjà remarqués ?

Peut-être pas, mais vous voyez la pizzeria du coin de votre rue qui a toujours une queue de 50 mètres de long. Vous vous dites tout de suite que la nourriture est bonne et le service de meilleure qualité que la pizzeria d’en face, qui elle, n’a pas de file d’attente. Il s’agit là du biais de popularité, on se fie à une information parce que plusieurs personnes y croient.

Lorsque nous voulons réserver un hôtel sur Booking, cette plateforme en ligne de réservation utilise de multiples biais pour vous inciter à passer une réservation chez eux.

Tout d’abord les prix. Le wording est très important et certains messages comme « Jackpot ! Il s’agit du tarif le plus bas que vous ayez vu jusqu’à présent pour vos dates à Paris ! » sont là pour vous convaincre que vous faites une bonne affaire et que vous ne trouverez pas mieux ailleurs. De même lorsqu’un prix est barré et qu’un prix moindre est proposé à côté de celui-ci, il s’agit du biais de l’effet d’ancrage. Vous pensez faire une bonne affaire et avoir un hébergement moins cher que son prix d’origine.

Une autre manière pour Booking d’inciter les clients à réserver chez eux est de transmettre le besoin d’agir vite grâce à certaines tournures de phrases comme :

  • « Forte demande – il ne reste plus que 2 hébergements sur notre site ! »
  • « Établissement réservé 8 fois au cours des dernières 24 heures ! »
  • « Dernière chance ! Il ne reste plus que 1 chambre sur notre site ! »
  • « 26 autres personnes regardent cette page. »

Il s’agit ici d’un sentiment d’urgence qui pousse les personnes (indécises ou non) à passer à la réservation par peur de ne pas pouvoir le faire plus tard faute de places disponibles.

En présentant une grande quantité d'information ou induisant un sentiment d'urgence, Booking génère à dessein des biais de raisonnement auprès de ses utilisateurs ;  ils deviennent alors plus prompt à commettre des erreurs ou à juger à la hâte.

3 - Qu’est-ce qu’un biais cognitif ?

Un biais cognitif est donc un raccourci dans le schéma de raisonnement d’un individu. Il peut se produire lorsqu’il y a une grosse quantité d’informations à gérer d’un coup ou bien lorsqu’il faut agir vite. Ils influencent donc nos choix en commettant des erreurs de jugement.

Nous pouvons distinguer 4 regroupements de biais cognitifs :

  • Le premier lié au besoin d’agir vite
  • Le second, lié à la mémoire
  • Le troisième lié à une surcharge d’informations
  • Le dernier qui porte sur le manque de sens

Le besoin d’agir vite :

Le besoin d‘agir vite va être lié à l’immédiateté et la facilité. Le cerveau va chercher à préserver notre autonomie en évitant de prendre des décisions irréversibles et ainsi privilégier les tâches rapides. On va donc vouloir favoriser les options les plus simples face aux options les plus complexes.

La mémoire :

Le cerveau a tendance à réduire et généraliser les informations. Il va donc avoir tendance à trier et synthétiser les informations recueillies. Cette synthétisation va engendrer des généralités en modifiant et renforçant certains souvenirs en fonction de notre ressenti. Sans s'en rendre compte, on se retrouve à effacer ou à minimiser des informations spécifiques. On appelle ça l’auto-renforcement.

La surcharge d’informations :

Lorsqu’il y a beaucoup de données, on va avoir tendance à retenir les choses bizarres, drôles, qui sortent de l’ordinaire. On les retient et on leur donne plus d’importance que celles qui sont plus classiques ou ordinaires pour nous.

Souvent amenés à être force de proposition, on cherche à avoir raison. Notre meilleure alliée pour ce biais est la data. Nous sommes attirés par celles qui sont en accord avec nous, parmi toutes les données récoltées. En absence d’objectivité, on va influencer les informations pour que les résultats tournent en notre faveur.

Le manque de sens :

Notre cerveau a tendance à combler le vide qu’il trouve entre deux informations avec un élément connu. Lorsque que l’on aborde un nouveau sujet, il arrive que l'on soit entouré de personnes qui pensent connaître et maîtriser le sujet que les autres. Nous avons souvent tendance à penser à la place des autres. C’est un des automatismes du cerveau qui simplifie l’image complexe d’une pensée inconnue avec un modèle de pensée bien moins complexe et déjà connu qui aura donc plus de sens pour nous.

Vous êtes désormais conscient de ce qu’est un biais cognitif théoriquement. Nous allons vous partager dans un prochain article notre expérience des biais cognitifs en tant qu’UX Designer chez OCTO. Vous y trouverez également un bonus pour sensibiliser votre équipe à ces enjeux et découvrir ou se réapproprier ce qu’est un biais cognitif.