Agile France 2016 : hors des tranchées ?
Agile France, c’est une conférence sur les Méthodes Agiles, d'accord. Mais certaines présentations abordent des sujets a priori différents, cherchent à créer des ponts avec d’autres disciplines. Cela permet aux participants de développer une culture plus large de l’agilité, de découvrir d’autres modèles et perspectives bien utiles au quotidien. Ce billet vous donne un petit aperçu de quelques unes des présentations « alternatives » que l’on pouvait suivre à Agile France cette année. Et peut-être quelques idées d'outils à tester !
Suivre la voie toltèque
En tant que Coach Agile, je me reconnais assez bien dans la façon dont Thierry Gabriel Cros présente son métier : aider à prendre conscience de la Réalité pour amener un Changement et atteindre Valeur et Qualité. Dans sa présentation Agile et voie toltèque, Thierry nous partage l’inspiration qu’il a trouvée dans les accords toltèques pour conduire le changement, qu'il soit individuel ou collectif, pour accompagner une personne ou une équipe.
1 - Poser une intention
Comme on peut le faire par du coaching orienté solutions ou quand on mène une futurespective, il s'agit de se représenter un meilleur futur auquel on aspire. Et plus précisément :
- que cette représentation fasse appel aux différents sens : je peux décrire à quoi je vois, j'entends que le changement souhaité s'est produit, mon émotion… [exemple : j’imagine que cette fois-ci, la démonstration de fin d’itération se passera bien : le Product Owner sera satisfait de l'avancement, l’équipe recevra des félicitations et repartira motivée, je sentirai de la joie !]
- que je sois confiant dans sa réalisation [j'y crois, j'ai foi dans cette possibilité],
- et qu'elle soit compatible avec mon agenda personnel [j’ai bien prévu de participer aux prochaines démonstrations]
2 - Maîtriser son attention
Mon intention est maintenant posée. Pour que cette vision encore imaginaire devienne bien réelle, que faire ? A quels événements dois-je porter mon attention pour détourner le cours de l'histoire ? Ici, un regard extérieur peut m'aider. Car nous interprétons tout événement selon notre vécu personnel, notre mémoire des événements. Je suis donc potentiellement aveugle à une réalité alternative. L'idée est de voir les choses autrement, ou demander à quelqu’un de me les montrer autrement. [j’ai toujours présenté l’avancement par l’écart entre le prévu et le réalisé et c’est une source d'insatisfaction… n’y a-t-il pas une meilleure façon de faire ?]
3 - Toujours faire de son mieux
Une fois identifié un sujet d'attention, comment puis-je faire mieux ? Notre "mieux" varie dans le temps en fonction de notre énergie. Mon niveau d'énergie me permet-il de faire mieux à ce moment-là ? [Je mets à jour les indicateurs d'avancement présentés d’une itération sur l’autre de manière mécanique, à l'arrache le soir précédant la démo sans faire l’effort de les challenger. Si je me réservais du temps le matin du jour précédant la démo, je pense pouvoir faire mieux.]
4 - Répéter, répéter, répéter
Changer un comportement bien ancré demande de répéter le nouveau geste. Si le changement que j’ai testé me semble aller dans le bon sens, il s’agit de persévérer ! [Pour ne pas retomber dans mon habitude de préparer mes indicateurs au dernier moment, je m’assure de me tenir à mon nouveau créneau matinal de préparation des indicateurs d'avancement, par exemple en m’assurant le concours d’un collègue - jusqu’à avoir ancré ma nouvelle pratique]
Sortir du cadre… au sens propre !
Prendre l'air en équipeIl y a bien dans ces présentations décalées l'idée même de faire différemment, d'essayer autre chose pour provoquer un changement. Les mêmes causes ayant les mêmes effets, il s'agit d'oser "sortir du cadre". Pour Fanny Walter, cela peut être sortir au sens propre : emmener l'équipe à l'extérieur, ne serait-ce que dans le jardin public d'à-côté, se reconnecter un instant à la nature et aux autres, se promener ensemble et discuter des nouvelles perspectives que cela nous offre sur tel projet, telle difficulté, ou sur notre relation.
Explorer ce qui ne va pas
Explorer l'iceberg pas à pas Le modèle de l'iceberg de Satir Emmanuel Gaillot et Raphaël Pierquin nous ont proposé de chercher plutôt à l’intérieur, en utilisant le modèle de l'iceberg de Virginia Satir. En disposant sur le sol des feuilles A4 représentant chacune des zones de l’iceberg, je peux littéralement me déplacer entre ces zones pour explorer un événement qui m’a posé problème. Un partenaire / coach peut, par ses questions, m’aider dans mon exploration du problème.
Ou encore improviser !
Vincent Daviet nous a fait pratiqué quelques exercices de théâtre d’improvisation, issus du livre Improving teams de Paul Goddard. En anglais, "improvise" (improviser) et "improve" (améliorer) ont la même racine.
Un exemple d'atelier pour briser la glace dans un groupe
On libère l’espace pour pouvoir circuler dans la pièce, et tout le monde marche silencieusement en occupant l’espace ; dès que l’animateur pose une question, j’y réponds à la personne la plus proche de moi à ce moment-là (ex : « Pourquoi es-tu là ? ») ; et ainsi de suite pendant quelques tours de questions que l’animateur juge pertinentes à poser.
Une autre idée pour créer du lien et de la confiance au sein d’un groupe
Les participants s'assoient en cercle ; chacun réfléchit à une assertion à partager avec le groupe ; un premier participant se lève, se place au milieu du cercle et énonce son assertion. Les autres participants pour qui elle est vraie se lèvent. Puis l’un de ceux qui sont debout enchaîne, etc. On peut commencer par des choses très simples (« j’adore le chocolat ») et aller progressivement vers des choses plus difficiles (« je n’ai pas une vision claire des priorités », « je ne suis pas à l’aise avec notre nouvel outil de tests », « j'ai peur des conséquences si on ne livre pas à la date prévue »...). Intéressant pour se découvrir des affinités, et aussi se rendre compte que l'on n'est pas seul à éprouver des doutes ou des difficultés.
Une façon originale de brainstormer pour imaginer comment répondre à un besoin des utilisateurs
L’équipe brainstorme tout d’abord pour exprimer des besoins sous forme de User Story selon le format « Je tant que… je veux… afin de … » (ex : En tant que nouvel arrivant dans l'entreprise, je peux suivre l’avancement de toutes mes démarches afin de gagner du temps, ne rien oublier et rester serein tout au long du processus). L’exercice du génie met alors en scène deux rôles joués par des membres de l'équipe : un génie et un client (qui peut être le Product Owner, cela peut être intéressant et amusant que le rôle soit tenu par un développeur). Celui qui joue le rôle de "client" prend une première User Story, et propose lui-même au génie différentes manières d’exaucer son voeu (phase d’ouverture). Tant que le génie n’est pas satisfait par la proposition, il refuse d’exaucer le voeu. Cette phase de refus force à se creuser la tête pour aller chercher autre chose, faire plus simple... Au fur et à mesure que le client propose des solutions, le génie peut poser des questions, challenger pour les rendre plus pertinentes (phase de convergence, puis de bonification). Le bon génie va donc challenger son client pour faire émerger de meilleures idées. Cet atelier me paraît intéressant pour redynamiser la collaboration entre Product Owner et développeurs.
Inspirer, s'inspirer
Bref, les sources d'inspiration sont infinies. Je repars de cette édition Agile France 2016 avec quelques outils supplémentaires à expérimenter dans ma boîte de coach agile, plus riche d’avoir échangé et moi aussi partagé un retour d’expérience issu de mon travail chez Meetic. Alors, rendez-vous l’année prochaine ?