Et si nous définissions l’Internet des objets ?
Le concept
L’Internet des objets repose sur l’idée que tous les objets seront connectés un jour à Internet et seront donc capables d’émettre de l’information et éventuellement de recevoir des commandes. On parle aussi d’ “ubiquitous computing”, c’est à dire informatique omniprésente, ambiante, ou pervasive. Ce nouveau paradigme informatique est basé non plus sur le PC, mais sur des objets quotidiens intégrant des capteurs et des capacités de communication. L’internet des objets propose de créer une continuité entre le monde réel et le monde numérique : il donne une existence aux objets physiques dans le monde numérique.
Sur le plan fonctionnel, l’Internet des objets désigne une informatique qui se fond dans notre quotidien pour nous simplifier la vie, nous faire gagner du temps, décharger notre cerveau de la mémorisation de données logistiques (itinéraires, agenda, etc.). Il permet de créer de nouveaux usages, comme, par exemple, des informations en temps réel sur la localisation de ses amis. Il permet aussi de faire des mesures exhaustives, là où on se contentait dans le passé d’un simple panel, comme par exemple avec la mesure du trafic automobile dans les rues de la capitale.
L’internet des objets est largement connecté au sujet “Web Squared” (le successeur du Web 2.0 selon Tim O’reilly) : il s’agit d’un Web basé moins sur les pages HTML que sur la publication de données structurées émises par les médias sociaux, les objets, les bases de données publiques (mouvement OpenData), etc. Notre conviction est que l’Internet des objets va générer une somme colossale de données qu’il faudra analyser et interpréter. Il requiert donc des architectures d’un nouveau genre de type “BigData” capables de monter en charge à la manière des infrastructures des grands du Web (voir billet sur l’architecture de l’internet des objets).
On peut conclure cette petite introduction en signalant que les règles et pratiques sur la protection de la vie privée devront probablement évoluer avec l’Internet des Objets. Cet aspect est largement abordé dans le livre d’Adam Greenfield.
Les typologies d’objets
On peut distinguer plusieurs types d’objets dans notre sujet :
- Des marqueurs passifs (code barre, RFID, ...) qui nécessitent le recours à un système de lecture
- Des capteurs actifs spécialisés (podomètre Fitbit, balance Withings, Kinect …) capables de transmettre leurs données directement vers Internet ou indirectement via un PC
- Des objets “couteau suisse”, généralement des Smartphones, capables d’exécuter plusieurs scénarios (suivi du sommeil SleepCycle, podomètre Nike+, géolocalisation Google Latitude,...). Ces objets généralistes sont généralement moins précis dans leurs mesures que les capteurs spécialisés.
L’interaction avec le monde réel peut prendre plusieurs formes :
- Mesure de données environnementales : localisation, température, vent,...
- Mesure de données comportementales : mouvement de personnes, ...
Les usages
On peut distinguer deux grandes familles d’usage de l’Internet des objets :
Usages sans rétroaction
Dans ce cas, l’Internet des Objets est utilisé pour faire une sorte de monitoring :
- consommation de l’objet (énergie pour une voiture)
- état de l’objet (niveau d’huile pour une voiture)
- mesure du contexte environnemental (météo, trafic routier, foule dans les transports,...)
- mesure des paramètres personnels d’un individu ou Quantified Self (activité sportive,...)
- activité d’une infrastructure (Pass Navigo, réseau de télécommunication, réseau d’énergie, ...)
Les utilisateurs des données peuvent être : l’usager final, un fournisseur, une administration publique.
Les données remontent des indicateurs permettant :
- des tableaux de bords analytiques, pour des fonctions décisionnelles (ex : augmenter le nombre de train sur le réseau Paris/Lyon)
- la détection d'évènements anormaux (ex : saturation des transports lors d’une manifestation)
- de disposer d’informations sur un individu, ses comportements et consommations, … (ex : mes performances sportives de la semaine)
- de ramener les informations d’un individu à une population à des fins de comparaison pour lui même ou pour le fournisseur de service (ex : je consomme plus de gaz que les usagers vivant dans un appartement de même surface)
- de proposer la “gamification”, c’est à dire une compétition entre l’individu et ses pairs afin d’optimiser l’usage du service (ex : faire baisser sa consommation électrique pour gagner des prix)
Usages avec rétroaction
Dans ce cas, l’Internet des Objets permet de :
- piloter les objets à distance, par exemple dans des applications domotiques (ex : allumer la lumière lorsque je rentre à la maison)
- d’envoyer des notifications au fournisseur (ex : provisioning de yaourts car les rayons du supermarché sont vides)
- d’envoyer des notifications aux usagers (ex : ralentir car l’autoroute est saturée)
Perspectives
Nous avons la conviction que l’Internet des objets est un sujet majeur pour les années à venir.
Voici quelques pistes d’usages plus ou moins futuristes :
- fournisseurs d’énergie (EDF, GDF) et d’infrastructure partagée (Veolia) : mesure et diffusion d’informations sur les consommations
- assurance ou loueurs de voitures : monitoring de la conduite automobile et police d’assurance selon le style de conduite
- banque : localisation des personnes dans le cadre des paiements mobiles pour permettre la détection des fraudes, suivi des fourgons blindés pour leur sécurité
- industrie : gestion de la chaîne d’approvisionnement, suivi des déplacements des collaborateurs dans les zones à risques (centrales nucléaires)
- télécommunications : suivi d’activité pour optimiser les topologies réseaux
- sécurité sociale : intégration des informations d’activité sportive des citoyens au sein de leur dossier médical patient
- collectivités locales : adaptation en temps réel des réseaux de transports en fonction de l’affluence, gestion de l’éclairage public en fonction de la présence de personnes dans les rues, ...
Alors, quand pensez-vous lancer votre projet d’Internet des objets ?
L’internet des objets passera par des architectures BigData déployées :
- en interne, probablement via des technologies de type noSQL
- sur le Cloud avec des plateformes comme sen.se, SimpleGeo.com, pachube.com, etc.
Sur le même sujet :
- Le livre de référence sur le sujet : Everyware: The Dawning Age of Ubiquitous Computing, Adam Greenfield.
- Présentation de rafi Haladjian, créateur du Nabaztag, à l’USI2011 : “Connecter tous les objets, pourquoi ?”
- voir la dernière partie de “Une brève histoire de l'avenir”, Jacques Attali
- Quelques billets plus anciens sur le sujet